Category Archives: Le vin

La Tâche, quel panache !

La Société Civile du Domaine de la Romanée Conti actuelle (DRC) possède des vignes sur les grands crus communaux de Vosne-Romanée et Flagey-Echézeaux :

• Romanée-conti, 1 hectare 805 (6.000 bouteilles, monopole)
• La Tâche, 6 hectares 062 (20.000 bouteilles, monopole)
• Richebourg, 3 hectares 511 (11.000 bouteilles, total du cru 8 hectares 034)
• Romanée-St-Vivant, 5 hectares 285 (17.000 bouteilles, total du cru 9 hectares 437)
• Grands Echézeaux, 3 hectares 526 (11.500 bouteilles, total du cru 9 hectares 144)
• Echézeaux, 4 hectares 670 (15.000 bouteilles, total du cru 37 hectares 692)
• Elle possède aussi un peu de Montrachet (0 hectare 676 sur les 8 hectares).

La Tâche est donc, comme la Romanée Conti, un monopole de la DRC. Selon Aubert de Villaine, associé-gérant, c’est un vin d’une grande rigueur, un vin vertical, qui lui évoque le célèbre portrait de Richelieu par Philippe de Champaigne.

richelieu.jpg

Triple Portrait de Richelieu
Huile sur toile, c. 1640, 58 x 72 cm, National Gallery, Londres
C’est vrai, « Si la Bourgogne a fait et fait toujours des vins qui la placent au sommet de la hiérarchie mondiale, c’est grâce au terroir. » Et ce tableau nous parle de ce terroir. Ce ciel brun offre la couleur de la terre. le caractère multidimensionnel de ce vin, la verticalité, la rigueur, la sagesse même, l’harmonie, la grandeur, la retenue altière, la maîtrise… tout y est ! Cela donne formidablement envie d’en boire…
C’était dit-on le vin le plus réputé au temps du Prince de Conti puisque la Romanée n’était plus dans le commerce (le veinard, tout était réservé pour sa table et on a sûrement souvent trinqué avec à la Pompadour à qui le prince avait « ravi » le domaine). Au début de la Révolution française, La Tâche appartenait à Louis-Philibert Joly de Bévy. Il fut confisqué et mis aux enchères comme bien national en 1794 et acheté par Claude-François Viénot. En 1800, il est racheté par Nicolas-Guillaume de Basire et revint par mariage au général Liger-Belair en 1815. Sa famille en fut propriétaire jusqu’à son acquisition par la DRC en 1933.

La Tâche actuelle est née de l’union de La Tâche Joly de Bévy (1 hectare 43) originelle de la Révolution, et d’une grande partie du lieu-dit les « Gaudichots » (4 hectares 62) la jouxtant.

Les « usages locaux, loyaux et constants », d’appeler durant tout le IXX ème siècle les Gaudichots, La Tâche furent définitivement acceptés par décision judiciaire en 1932. Une dégustation des différentes « Tâches » fut organisée afin de définir les limites du futur monopole en s’appuyant sur « l’intégrité du terroir » et « l’appréciation portée sur le vin ». Le vignoble définitif s’étend sur 6 hectares 062 et produit en moyenne 20.000 bouteilles chaque année.

_______________________________________
Petite biographie de Philippe de Champaigne

Philippe de Champaigne est né à Bruxelles en 1602. Il fait ses débuts dans les ateliers de Jean Bouillon, puis dans celui de Michel Bourdeaux et ensuite dans celui du célèbre paysagiste, Fouquières. En 1621, il quitte sa région pour se rendre en Italie, en faisant escale à Paris d’où il ne partira plus. Ses débuts dans la capitale française seront difficiles, mais bientôt Georges Lallemand et Nicolas Duchesne (deux peintres de renom, il épousa d’ailleurs la fille de ce dernier en 1628) le protègent et lui procurent ses premières commandes. En 1623, il habite au collège de Laon avec Nicolas Poussin avec qui il gardera de très bonnes relations. La fortune lui sourit enfin en 1628, quand lui est offerte, après la mort de Duchesne, la charge de peintre ordinaire de la reine mère, Marie de Médicis et de valet de chambre du Roi avec logement au Luxembourg, fraîchement décoré par Rubens. L’année suivante, il est naturalisé. C’est l’année 1635 qui marque le début de ses relations avec Richelieu, il décore la galerie des hommes illustres du Palais Cardinal, mais partage tout de même la commande avec Simon Vouet…

Le vin, quelques belles citations

« Le rapport est le même entre un verre d’eau et un verre de vin qu’entre un tablier de toile et un tablier de cuir.
Sans doute est-ce par le tanin que le vin et le cuir se rejoignent.
Mais il y a entre eux des ressemblances d’une autre sorte, aussi profondes : l’écurie, la tannerie ne sont pas loin de la cave.
Ce n’est pas tout à fait de sous terre qu’on tire le vin, mais c’est quand même du sous-sol : de la cave, façon de grotte.

C’est un produit de la patience humaine, patience sans grande activité, appliquée à une pulpe douceâtre, trouble, sans couleur franche et sans tonicité.
Par son inhumation et sa macération dans l’obscurité et l’humidité des caves ou grottes, du sous-sol, l’on obtient un liquide qui a toutes les qualités contraires : un véritable rubis sur l’ongle.
Et, à ce propos, je dirai quelque chose de ce genre d’industrie (de transformation) qui consiste à placer la matière au bon endroit, au bon contact… et à attendre.
Un vieillissement de tissus.
Le vin et le cuir sont à peu près du même âge.
Des adultes (déjà un peu sur le retour).

Ils sont tous deux  du même genre : moyenne cuirasse.
Tous deux endorment les membres à peu près de la même façon. Façon lente. Par la même occasion, ils libèrent l’âme (?). Il en faut une certaine épaisseur.
L’alcool et l’acier sont d’une autre trempe ; d’ailleurs incolores. Il en faut moins.

Le bras verse au fond de l’estomac une flaque froide, d’où s’élève aussitôt quelque chose comme un serviteur dont le rôle consisterait à fermer toutes les fenêtres, à faire la nuit dans la maison ; puis à allumer la lampe.
A enclore le maître avec son imagination.

La dernière porte claquée résonne indéfiniment et, dés lors, l’amateur de vin rouge marche à travers le monde comme dans une maison sonore, où les murs répondent harmonieusement à son pas.
Où les fers se tordent comme des tiges de liseron sous le souffle émané de lui,  où tout applaudit, tout résonne d’applaudissement et de réponse à sa démarche, son geste et sa respiration.
L’approbation des choses qui s’y enlacent alourdit ses membres. Comme le pampre enlace un bâton, un ivrogne un réverbère, et réciproquement. Certainement, la croissance des plantes grimpantes participe d’une ivresse pareille.

Ce n’est pas grand’chose que le vin. Sa flamme pourtant danse en beaucoup de corps  au milieu de la ville.
Danse plutôt qu’elle ne brille. Fait danser plus qu’elle ne brûle ou consume.
Transforme les corps articulés, plus ou moins en guignols, pantins, marionnettes.
Irrigue chaleureusement les membres, animant en particulier la langue.

Comme de toutes choses, il y a un secret du vin ; mais c’est un secret qu’il ne garde pas. On peut le lui faire dire : il suffit de l’aimer, de le boire, de le placer à l’intérieur de soi-même. Alors il parle.
En toute confiance, il parle.
Tandis que l’eau garde mieux son secret ; du moins est-il beaucoup plus difficile à déceler, à saisir. »

Francis Ponge

__________________________________

« Chez nous, les hommes devraient naître plus heureux et joyeux qu’ailleurs, mais je crois que le bonheur vient aux hommes qui naissent là ou l’on trouve de bons vins… »

Léonard de Vinci

Publicité pour la consommation de vin

Ou comment Pasteur devient un grand prescripteur. Une image trouvée par l’ami Karim Houari avec des slogans à couper le souffle…

 

• Donnez la préférence aux restaurants qui comprennent le vin dans le prix du repas.

• Moyenne de la vie humaine : 59 ans pour un buveur d’eau, 65 ans pour un buveur de vin.

• 67 % des centenaires sont des buveurs de vin.

• Le vin, c’est le lait des vieillards.

• « Le vin est la plus saine et la plus hygiénique des boissons. » Pasteur. 

 

f293d5dffea8f402898b2c047b673f1f.jpg

 

Merci Molière

Qu’ils sont doux
Bouteille jolie,
Qu’ils sont doux
Vos petits glou-gloux ?
Mais mon sort ferait bien des jaloux
Si vous étiez toujours remplie.
Ah bouteille, ma mie,
Pourquoi vous videz-vous !

Molière
Le Médecin malgré lui

Dégustation chez Henri Bonneau, à Châteauneuf-du-Pape

J’ai eu la chance, ce mercredi 30 avril 2008, grâce à Daniel Combin, d’aller visiter la cave d’Henri Bonneau, le vinificateur mythique de Châteauneuf-du-Pape. J’étais avec Matthieu Cosse, l’ami vigneron de Cahors (entre autres), les sommeliers du Louis XV à Monaco et quelques autres amateurs. C’était délicieux, hors du temps. Il pleuvait comme vache qui pisse, et nous avions l’impression d’être des grenouilles allongées dans la mousse verte buvant avec des pailles un nectar velouré. De 2000 à 2006, de P à G, de Marie Beurrier (la tante de l’épouse d’Henri, qui leur a cédé « un ranch dans le limousin » dixit le Maître) à la Réserve des Célestins en passant par les Rouliers, la dégustation fût un magnifique ricochet entre les matières, les soleils, les grenaches… Un grand merci à Henri et Marcel.

 

cff389f7607e98d390e7315758ff85ab.jpg

 

Vive le vin !

La loi Evin, comme vin, comme évincer, comme en vain… bref, la bien nommée n’a pas prévu la révolution Internet. En conséquence, évidemment, on se demande aujourd’hui si on peut, si on doit, utiliser la toile pour promotionner, expliquer, révéler, échanger… sur le vin. Notre ministre de l’économie, qui répond au député Gérard Charasse, n’y va pas de main morte…

 
Question (23/10/07)
M. Gérard Charasse attire l’attention de Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’emploi sur la promotion des vins français sur Internet
. En France, la promotion des vins est strictement réglementée par le code de la santé publique, dans le cadre de la propagande ou de la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques. Pour des raisons de santé publique, les opérations de promotion pour ces boissons sont autorisées exclusivement sur certains supports de communication, principalement la presse écrite à l’exclusion des publications destinées à la jeunesse, la radiodiffusion sonore par certaines catégories de radios dans certaines tranches horaires, les affiches et enseignes sur les lieux de vente. Cependant, la loi ne fait pas mention du média moderne qu’est Internet. Absent de la liste des supports autorisés, le réseau mondial de communication voit pourtant se développer la promotion de vins par des sites de vente en ligne. En bénéficient tout particulièrement les vins d’origine étrangère qui ignorent les restrictions de publicité de leurs concurrents français. Cette situation paradoxale favorisant la concurrence internationale sur notre marché intérieur se double d’une distorsion de concurrence au détriment des vins français sur les marchés extérieurs. Internet, support incontournable pour l’exportation dans une économie mondialisée, semble en effet sous-utilisé par les producteurs de vins français en raison notamment des incertitudes juridiques concernant les limites de la publicité sur ce réseau. Le développement des ventes à l’exportation est pourtant vital pour l’économie des régions viticoles de notre pays. Il lui demande si le Gouvernement envisage de faire évoluer le cadre réglementaire applicable à la promotion des vins français sur Internet.

Réponse (11/03/08)

Le nombre de décès attribuables à l’alcool en France est évalué à 45 000. L’alcool est directement à l’origine de pathologies comme la cirrhose du foie ou le syndrome d’alcoolisme foetal. Il est également impliqué dans la survenue de nombreux autres dommages : cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS), maladies de l’appareil circulatoire, cancers du foie, névrites optiques, polynévrites, mais aussi troubles psychiques, accidents, rixes et suicides. La littérature internationale montre bien que la réglementation et la restriction de la publicité en faveur des boissons alcoolisées constituent l’un des leviers essentiels dans une stratégie de lutte contre le risque alcool. En France, l’article L. 3323-2 du code de la santé publique énumère les supports sur lesquels la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcoolisées est exclusivement autorisée, au titre desquels figurent entre autres la presse, la radio et l’affichage, l’envoi de messages, circulaires commerciales, catalogues et brochures par les producteurs, fabricants, importateurs, négociants… La volonté du législateur est notamment de protéger les plus jeunes en limitant le nombre de supports publicitaires autorisés. Le support publicitaire que constitue internet ne figurant pas à l’article L. 3323-2 du code de la santé publique, la publicité en faveur des boissons alcoolisées est interdite sur ce support, ainsi que l’a confirmé la récente ordonnance de référé du 8 janvier 2008 du tribunal de grande instance de Paris. Cette interdiction, qui concerne tous les types de boissons alcoolisées, les vins français étant à cet égard soumis aux mêmes dispositions que les autres boissons alcoolisées, quelles qu’en soient la teneur en alcool ou l’origine, se justifie d’autant plus que l’outil internet constitue un puissant vecteur d’information et de divertissement pour les plus jeunes. Il ne semble donc pas opportun de revenir sur cette position.

Le buveur justifié, par Anacréon XIX

La terre boit la pluie
Et les arbres la terre
La mer se désaltère au passage des brises
Le soleil boit la mer
La lune, le soleil
Pourquoi donc camarades se défendre de boire ?

Anacréon XIX (époque gréco-romaine)

Anacréon, né vers 550 av. J.-C. à Téos, en Ionie, mort vers 464 av. J.-C., est l’un des plus grands poètes lyrique grec avec Alcée de Mytilène et Sappho. Il fut surnommé Le chantre ou le vieillard de Téos.

On en sait peu sur sa vie. Selon la tradition, il serai né à Téos une ville Ionienne sur les cotes d’asie mineure. Le nom et l’dentité de son père reste sujet à discussion, il y aurait quatre possibilités : Scythianos, Eumélos, Parthénios, ou Aristocritos. Il s’exile, vers 540, pour Abdère quand Harpage, général de Cyrus II, prend sa ville natale. Anacréon part ensuite pour Samos, où il est protégé par le tyran Polycrate, qu’il loue dans ses poèmes.

Après la mort de ce dernier en 522, il est invité par Hipparque à Athènes. Là, il fréquente le cercle d’artistes rassemblé par le tyran et les meilleures familles de la cité. Il se lie en particulier avec Simonide de Céos et Xanthippe, père de Périclès. Il célèbre également la beauté de Critias, fils de Dropidès et héros du dialogue de Platon qui porte son nom (cf. Critias). Après la chute des Pisistratides, il regagne son Ionie natale.

Il meurt à l’âge de 85 ans à Téos. Selon la tradition, il se serait étouffé avec un raisin sec. Simonide lui dédie deux épitaphes, Athènes érige sa statue sur l’Acropole et Tégée place ses portraits sur sa monnaie.

Œuvre
Anacréon se consacre principalement à la poésie amoureuse et à la poésie de banquet. Ainsi, la statue que lui consacrent les Athéniens le représentent comme un poète inspiré par Dionysos. Le style d’Anacréon se caractérise par sa légèreté et son charme. Le vin est loué mais sans excès (« dix mesures d’eau pour cinq de vin, voilà le bon mélange », fgt. 11), l’amour doit également rester mesuré (« Je n’aime et je n’aime pas. Je suis fou et je ne suis pas fou », fgt. 83). Ce style est rapidement connu sous le nom d’« anacréontique ». On appelle ainsi Anacreontea des recueils de poèmes légers.

Il emploie des mètres variés ; les strophes les plus courantes sont composées de mètres glyconiens terminés par un mètre phérécratien, ou de mètres dits « anacréontique », composés d’ioniques mineurs. Ce type de strophe rencontrera un très grand succès par la suite, chez les Grecs comme chez les Romains.